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N.6
Organisation d'essais interlaboratoires de validation à l'échelle européenne pour la détection de Gibberella circinata dans les semences de pins


R. Ioos, C. Fourrier. ANSES Laboratoire de la Santé des Végétaux, Unité de mycologie, Nancy (France).

R. Ioos, C. Fourrier (2012). Organisation d'essais interlaboratoires de validation à l'échelle européenne pour la détection de Gibberella circinata dans les semences de pins, EuroReference, No. 6, ER06-12M03. http://www.ansespro.fr/euroreference/numero6/PND001.htm
Gibberella circinata (anamorphe Fusarium circinatum) est un champignon phytopathogène responsable de la maladie du chancre résineux des pins (pine pitch canker). Cette maladie affecte exclusivement les espèces de Pinus mais a été aussi décrite sur pin douglas (Pseudotsuga menziesii). Cette maladie constitue une menace sérieuse sur les pins forestiers, causant des taux de mortalité important en cas d'attaque sévère, mais induisant a minima une réduction de la croissance et de la qualité du bois. Ce champignon peut en outre contaminer de façon cryptique les semences de pins, et causer des fontes de semis en pépinière. G. circinata est officiellement décrit aux USA, Mexique, Haïti, Afrique du Sud, Japon, Chili (Anonymous, 2005) et a été récemment rapporté en Europe, principalement dans des pépinières Espagnoles, Françaises et Portugaises, mais aussi dans des zones limitées de milieu naturel en Italie et en Espagne (Wingfield et al., 2008). G. circinata est principalement un parasite de blessure et pénètre dans l'hôte par le biais de morsures d'insectes foreurs, les pratiques de taille, et les blessures liées aux évènements climatiques. Le champignon se propage d'arbre en arbre par la dispersion aérienne de propagules asexuées (micro- ou macro-conidies), ou bien être véhiculé par les insectes (Gordon et al., 2001). Néanmoins, sa dispersion à longue distance résulte de transport de matériel végétal infecté, comme les semences (Storer et al., 1998). En effet, des semences de Pinus infectées sont très probablement responsables de l'introduction de l'agent du Pitch Canker en Californie (Gordon et al., 2001) et en Afrique du sud (Britz et al., 2001). Ce parasite est actuellement soumis à des mesures d'urgences réglementaires au niveau européen (Anonymous, 2007) et les pays membres ont l'obligation de conduire des plans de surveillance à son égard. L'EFSA a récemment présenté un avis concernant l'évaluation du risque phytosanitaire et des options de gestion de la maladie. Ses conclusions suggéraient que les semences de pin constituait le facteur de risque le plus important pour la dissémination du parasite (EFSA Panel on Plant Health, 2010).

Il existe actuellement plusieurs méthodes morphologiques et moléculaires pour confirmer l'identité du champignon isolé en culture pure ou pour le détecter directement
in planta. Les méthodes qui ont été décrites dans le protocole de diagnostic OEPP PM 7/91(1) (Anonymous, 2009) incluent des tests PCR-RFLP (Polymerase Chain reaction - Restriction Fragment Length Polymorphism), des tests PCR conventionnels et en temps réel. Plusieurs de ces protocoles utilisent en partie ou totalement des techniques développées par l'unité de mycologie du Laboratoire de la Santé des végétaux(Ioos et al., 2009). L'objectif majeur de ce projet consistait à évaluer différents de ces protocoles sur des semences de pins via des essais interlaboratoires de validation impliquant des laboratoires de référence européens. In fine, l'analyse des résultats obtenus devrait permettre de produire des valeurs de performances pour ces protocoles afin d'aider les laboratoires de référence européen et les organisations phytosanitaires des pays membre à choisir et utiliser le protocole qui correspond le mieux à leur attente en matière de seuil de détection, et de sensibilité et spécificité relatives.

Le projet EUPHRESCO
EUPHRESCO est un projet financé par le réseau EU FP6 ERA-NET (European Research Area - Network) sur la période 2006-2010. EUPHRESCO vise à améliorer la coopération et la coordination des programmes de recherche phytosanitaire (phytopathogènes et ravageurs réglementés ou émergents) au niveau européen à travers la mise en place de réseaux d'activités de recherche et l'ouverture mutuelle de programmes nationaux. Pour ce projet spécifique d'essais interlaboratoires sur Gibberella circinata, le mécanisme financier qui a été retenu par les pays partenaires était le système non compétitif, dans lequel chaque organisation de recherche de chaque pays est responsable de son propre financement.
L'unité de mycologie du laboratoire de la santé des végétaux a proposé de prendre en charge l'organisation et le suivi de ce projet : i) préparation et rédaction du projet soumis aux pays membre pour demande d'accord de partenariat, ii) préparation d'un calendrier pour le projet, iii) préparation de l'organisation générale des essais interlaboratoires (définition de la nature et du nombre d'échantillons) et coordination de son déroulement, iv) traitement statistique des résultats et rédaction du rapport final.

Recrutement des laboratoires participants et sélection des protocoles
Un appel à participation a été lancé fin 2010 via le réseau EMN (European Mycological Network) qui rassemble les unités de mycologie de nombreux laboratoires Européens de référence en charge de la santé réglementaire des végétaux. Douze laboratoires représentant 11 pays ont au final manifesté leur intérêt à participer à ce projet (tableau 1).
Un total de neuf protocoles est disponible dans la littérature (tableau 2). Afin de réduire les coûts pour les participants et d'augmenter la puissance statistique des essais, une première étape a consisté pour les 12 partenaires à voter pour 3 protocoles parmi les 9, en motivant leur choix par i) la maîtrise actuelle du protocole, ii) la facilité de mise en œuvre du protocole, ou encore iii) la perspective d'utiliser en routine le protocole. Les trois protocoles ayant remporté le plus de suffrages ont été retenus pour les essais interlaboratoires (tableau 2). Les participants devant par la suite choisir de tester individuellement un, deux ou trois de ces protocoles.

Taille des échantillons
La norme ISPM N°31 (International Plant Protection Convention, 2008) traite de façon complète le problème de l'échantillonnage. Dans le domaine des affaires phytosanitaires, et d'après ces normes, un échantillonnage statistiquement fondé est basé sur un certain pourcentage d'infection avec un niveau de confiance spécifique, et requiert donc que les « clients » potentiels des analyses (e.g. organisations nationales chargées de la protection des plantes, ONPP) déterminent a priori certains des paramètres interdépendants suivants : niveau acceptable de contamination, niveau de détection, degré de confiance, efficacité de détection, et taille de l'échantillon analysé. Certains de ces paramètres sont déterminés par la performance de la méthode, d'autres sont des choix assumés du « client » ; et in fine, la taille approprié d'échantillon à analyser peut en être déduite.
De plus, la méthode d'échantillonnage la plus appropriée doit être choisie. Etant donnés l'épidémiologie du parasite et sa nature cryptique dans les semences qu'il infecte (pas de symptôme externe visible), la distribution de -et le taux de contamination par-
G. circinata dans un lot de semence est imprédictible. La méthode d'échantillonnage aléatoire simple est donc la plus appropriée dans ce cas de figure.
Un autre des objectifs de ce projet EUPHRESCO «
Gibberella circinata » est de questionner les différentes ONPP afin de recenser les différentes valeurs envisageables des paramètres cités plus haut. Une proposition d'homogénéisation de ces derniers sera proposée par le laboratoire de la santé des végétaux, ce qui permettra de définir une taille d'échantillon statistiquement valide. Dans l'attente de ce retour d'enquête, la taille de 400 graines / lot, déjà proposée par la norme ISTA (International Seed Testing Association, 2002) a été retenue, pour des raisons pratiques. Cette taille pourra donc être réévaluée à l'issue du processus de consultation des ONPP.

Nature et préparation des échantillons
En accord avec les recommandations de l'OEPP (Anonymous, 2010) et de la norme ISO 16140 (International Standardization Organization, 2003), chaque série d'échantillons à tester devait a minima comporter trois types de statut :
i) Lots témoins négatifs (semences indemnes de
G. circinata),
ii) Lots contaminés légèrement au dessus de la limite de détection (supposée correspondre à une semence contaminée parmi 400, à minima pour le protocole par isolement mycologique)
iii) Lots contaminés à un niveau correspondant à 10 fois la limite de détection (i.e. 10 semences contaminées parmi 400)
De plus, iv) des contrôles négatifs de spécificité ont été introduits par l'organisateur. Ces lots de semences ont été contaminés avec d'autres espèces de
Fusarium spp., proches de Fusarium circinatum d'un point de vue morphologique (permet de vérifier la spécificité du protocole utilisant l'identification morphologique), ou phylogénétique (permet de vérifier la spécificité du protocole utilisant des tests moléculaires). En revanche, afin de réduire les coûts pour les participants, le nombre de réplicats à tester par type de contamination a été réduit de 8 à 3. Au final, pour chaque protocole testé, chaque participant aura à tester 4 types de contamination x 3 réplicats, soit 12 échantillons de 400 semences.

La préparation des échantillons artificiellement contaminés a été confiée à l'institut Italien CRA PAV, partenaire du projet (cf. tableau 1). Le coût de la préparation et de l'expédition des échantillons de graines était à la charge de chaque participant. Pour l'importation de lots de semences artificiellement contaminés par
G. circinata, organisme réglementé, chaque partenaire a du produire une lettre officielle d'autorisation, en accord avec la directive 2008/61/CE (Anonymous, 2008) attestant qu'il disposait des infrastructures de biosécurité, de personnel formé et averti, et de procédures de travail appropriées.
La contamination des semences a été réalisée par trempage dans des solutions calibrées de microconidies de
Fusarium spp. produites en culture pure, puis séchage en conditions stériles pour stabiliser la contamination. Le succès de contamination (100 %) a été ensuite vérifié par isolement mycologique sur des graines prises aléatoirement dans les lots contaminés.

Calendrier prévisionnel du projet et diffusion des résultats
Le tableau 3 présente le calendrier prévisionnel du projet. Ce dernier a été officiellement lancé le premier janvier 2011 et devrait s'achever en mars 2012. Un meeting sera programmé début 2012 afin de faire un bilan de ce projet avec les partenaires. Une publication dans une revue scientifique à comité de lecture est prévue pour synthétiser les résultats de ce projet : obtention de critères de performances pour plusieurs protocoles et comparaison objective des performances des trois protocoles retenus, définition d'une taille consensuelle d'échantillon à analyser fondée statistiquement.
References

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161. 66-9.
Anonymous, 2008. Commission Directive 2008/61/EC of 17 June 2008 establishing the conditions under which certain harmful organisms, plants, plant products and other objects listed in Annexes I to V to Council Directive 2000/29/EC may be introduced into or moved within the Community or certain protected zones thereof, for trial or scientific purposes and for work on varietal selections. In: Union OJOTE, ed.
L157.
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Efsa Panel on Plant Health, 2010. Risk assessment of Gibberella circinata for the EU territory and identification and evaluation of risk management options.
EFSA Journal 8, 1620.
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International Plant Protection Convention, 2008. ISPM N° 31. Methodologies for sampling of consignments. In.
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Wingfield MJ, Hammerbacher A, Ganley RJ
, et al., 2008. Pitch canker caused by Fusarium circinatum - a growing threat to pine plantations and forests worldwide. Australasian Plant Pathology 37, 319-34.
Méthodes
Gibberella circinata est un champignon parasite des pins faisant l’objet de mesures d’urgences phytosanitaires européennes depuis 2007. Les semences de pins sont les principaux moyens de dissémination à longue distance de ce champignon et des outils de détection fiables et pratiques sont requis pour contrôler la qualité sanitaire des lots de semences importés et commercialisés en Europe. Le Laboratoire de la santé des végétaux a pris le leadership d’un projet européen EUPHRESCO visant à sélectionner et évaluer par essai interlaboratoires un ou plusieurs protocoles de détection ciblant ce parasite, ainsi qu’une méthode d’échantillonnage appropriée. Ce projet permettra aux états membres, aux laboratoires de référence ainsi qu’aux acteurs de la filière de disposer d’un ou plusieurs protocoles consensuels et validés dont le niveau de performance aura été déterminé par le biais d’une collaboration internationale.
Table 3: Provisional timetable for the EUPHRESCO “Gibberella circinata” project
Table 2: List of available protocols for the detection of Gibberella circinata in pine seeds. The protocols in bold were finally selected after a vote by the project partners.
Table 1: List of partners involved in the “Gibberella circinata” project
Semences de pins et contrôle négatif en cours d'enrichissement biologique
Organisation d'essais interlaboratoires de validation à l'échelle européenne pour la détection de Gibberella circinata dans les semences de pins
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