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Le laboratoire mobile d'analyse, outil de gestion du risque


M. Barbe-Le Borgne, B. Vanlerberghe, F. Rieunier
Laboratoire Central de la Préfecture de Police, Paris, France


M. Barbe-Le Borgne, B. Vanlerberghe, F. Rieunier (2012).
Le laboratoire mobile d'analyse, outil de gestion du risque, EuroReference, No. 7, ER07-12ME01.
http://www.ansespro.fr/euroreference/numero7/PN6001.htm


Méthodes
Pour répondre à la menace nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC), une capacité d'expertise a été développée, avec la création des réseaux de conseillers experts et de laboratoires Biotox-Piratox. Des moyens spécifiques ont été développés et mis en place auprès des différents services chargés de l'intervention pour l'analyse du risque, la protection et la décontamination.
Parmi ces moyens, le laboratoire mobile d'analyse joue un rôle essentiel dans l'évaluation du risque RBC.
Le texte ci-dessous décrit ses missions et la manière dont il les remplit, conformément à la circulaire n°750/SGDSN/PSE/PPS du 18 février 2011, relative à la découverte de plis, colis, contenants et substances suspectés de renfermer des agents radiologiques, biologiques ou chimiques dangereux.


La raison d'être des laboratoires mobiles d'analyse repose sur deux fondements :
- la nécessité de renseigner très rapidement les autorités, sur la nature des produits mis en cause, afin d'apporter la réponse sanitaire adaptée en terme de protection et de soins des populations, ainsi que d'éradication de cette menace,
- l'impératif de fournir aux laboratoires du réseau choisis pour effectuer les analyses de confirmation, des prélèvements correctement effectués et conditionnés, accompagnés de tous les renseignements nécessaires à leur traitement.

La gestion de l'événement à caractère radiologique, biologique ou chimique s'appuie dans un premier temps sur le recueil d'éléments pertinents rendant possible une première évaluation du risque et sur le choix des mesures appropriées prises par les primo-intervenants. Ceci nécessite l'emploi d'équipements analytiques adaptés, mis en œuvre rapidement par un personnel scientifique compétent.
En réponse à cette problématique, le laboratoire mobile dispose de matériels de détection et d'analyse aptes à la reconnaissance d'agents dangereux, qu'ils soient solides, liquides ou gazeux. L'expérience et la qualification de son personnel lui permettent d'évaluer le risque en fonction des éléments de contexte et des données analytiques obtenues sur site.

La prise en compte des éléments de contexte est essentielle à l'évaluation du risque, permettant d'éviter la mise en œuvre de réponses non proportionnées à la juste gestion de l'événement (tels que ceux qui avaient été adoptés lors de la "crise de l'antrax" en région parisienne par exemple). Ils sont donc soigneusement examinés par le personnel scientifique armant le laboratoire mobile en étroite collaboration avec les personnels de Police et de Gendarmerie en charge de l'affaire sur place et la Cellule Nationale de Conseil du Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle de Crise de la Direction de la Sécurité Civile.

Dans un premier temps, si le contexte s'y prête, une levée de doute
pyrotechnique est effectuée par un service de déminage. La sécurité des opérateurs face à un risque mal identifié est indispensable.

Les opérateurs du laboratoire mobile utilisent les moyens de protection adaptés, garantissant leur propre protection et la maîtrise de la dispersion d'éventuels agents contaminants. L'entraînement au port d'équipements parfois lourds est pratiqué sous le contrôle de spécialistes tels que les sapeurs-pompiers.

Une levée de doute
radiologique est systématiquement effectuée par le personnel du laboratoire mobile qui connaît les limites de son contrôle. Il en tire toutes les conclusions utiles avec les réserves éventuelles qui conviennent. Il ne s'agit pas nécessairement de déterminer immédiatement la nature du radioélément ou du radionucléide éventuellement présent, mais d'écarter les risques d'irradiation et de contamination. Le laboratoire dispose d'équipements adaptés à la détection de rayonnements de tous types et à la mesure de débit de dose dans l'environnement lui permettant de définir un périmètre de sécurité, assisté le plus souvent par les sapeurs-pompiers.

En règle générale, on constate que, tout au moins en région parisienne, la plupart des actions suspectes sont liées à l'utilisation de produits chimiques. La détermination de leur nature
chimique permet de cerner le risque associé à leur présence. Le laboratoire mobile possède donc des appareillages adaptés à la détection et le plus souvent, à l'identification de tels agents.
Outre les détecteurs, utiles pour mettre en évidence la présence de substances gazeuses ou volatiles et déterminer ainsi les zones de plus fortes concentrations, de véritables analyseurs sont utilisés.
Concernant les agents organiques (et quelques minéraux), il s'agit de spectromètre de masse pour les agents gazeux ou volatils, de spectromètre infrarouge pour les solides, liquides et gaz et de spectromètre raman. Les agents minéraux toxiques sont également recherchés si nécessaire, à l'aide de méthodes moins sophistiquées (tubes colorimétriques, cellules électrochimiques, par exemple), les appareillages de laboratoire les plus performants pour ce type d'agents n'étant pas encore miniaturisés en systèmes portatifs ou transportables fiables et robustes.
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L'identification des agents chimiques se heurte à plusieurs difficultés : concernant les gaz, il se peut que les concentrations soient trop faibles sur site au moment de l'intervention pour conduire à l'identification immédiate. Il est en de même en cas de contamination de l'eau des rivières ou des canalisations à fort courant ou débit. Concernant les solides et liquides, les interférences dues à la présence de matrices complexes, comme des débris végétaux par exemple, ou la présence de mélange rendent les interprétations analytiques délicates. C'est la raison pour laquelle les opérateurs connaissent parfaitement les principes physiques mis en œuvre dans les détecteurs et les analyseurs et tiennent compte ainsi de leurs limites et des difficultés associées à chacune des techniques (interférents, faux négatifs ou faux positifs, seuils de sensibilité trop élevés) : l'interprétation de ces données ne peut être effectuée que par du personnel scientifique spécialiste en physico-chimie. Les détecteurs et analyseurs ont des performances complémentaires qu'il est impératif de connaître : certains sont plus sensibles que d'autres, ou plus spécifiques, par exemple.
Photo 2

Dans les cas où l'identification est possible, l'information est communiquée aux autorités. Dans les cas plus difficiles, il est néanmoins possible de donner le plus souvent des informations sur l'agent, sa famille chimique, ou dire ce qu'il n'est pas.

Tout contexte dont l'examen conduit à une suspicion de présence d'agent
biologique est considéré d'une manière particulière. En effet, il peut arriver que certains objets suspects, comme des flacons étiquetés et bien fermés, ne soient pas analysés sur site, le risque de contamination lié à l'ouverture de tels flacon étant considéré comme étant trop important. Si l'analyse immédiate est opportune, les outils adaptés à la détection de certains agents pathogènes sont mis en œuvre, il s'agit essentiellement de PCR temps réel et de tickets détecteurs, mais le nombre d'agents détectables sur site reste très limité. Dans tous les cas, les opérateurs conditionnent les prélèvements pour qu'ils soient transmis au plus vite à un ou plusieurs laboratoires spécialisés désignés par la Cellule Nationale de Conseil. Le rôle de cette dernière dans le processus du choix du laboratoire du réseau Biotox Piratox et du laboratoire de criminalistique est décrit dans la circulaire préalablement citée.

Les prélèvements sont effectués selon des protocoles définis pour satisfaire au mieux les exigences analytiques et la sécurité liée au transport.
Les emballages des prélèvements sont contrôlés pour s'assurer qu'aucune contamination résiduelle ou potentielle due à un manque d'étanchéité n'est possible vers le milieu extérieur.
Les fiches d'accompagnement des prélèvements proposées dans la circulaire préalablement citée sont renseignées afin que les laboratoires destinataires aient tous les renseignements utiles concernant leur dangerosité et qu'ils aient connaissance du contexte et du résultat des analyses effectuées sur site.

Un laboratoire mobile d'analyse est au service de la sécurité des personnes, il doit être en mesure d'assurer à minima toutes les missions décrites ci-dessus. Premier maillon de la chaîne dans la gestion du risque, son rôle est essentiel. En région parisienne, le
Laboratoire Central de la Préfecture de Police équipé de son laboratoire mobile dénommé "astreinte chimique" est en mesure de remplir ces missions 24h/24.





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Le laboratoire mobile d'analyse, outil de gestion du risque
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Photo 1. Analyse de gaz par spectrométrie de masse
Photo 2. Préparation d'une analyse de poudre par spectrométrie infrarouge