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Projet EQAdeBa - Mise en place de programmes d'assurance qualité pour la détection de bactéries hautement pathogènes présentant un risque en matière de bioterrorisme

R. Grunow (1), U. Sauer, A-M. Rohleder, D. Jacob, pour le compte des membres d'EQADeBa/ENHPB (2)
(1) Centre de sécurité biologique (ZBS 2), Institut Robert Koch, Berlin, Allemagne
(2) Membres du projet, voir tableau 1



R. Grunow, U. Sauer, A-M. Rohleder, D. Jacob (2012).
Projet EQAdeBa - Mise en place de programmes d'assurance qualité pour la détection de bactéries hautement pathogènes présentant un risque en matière de bioterrorisme, EuroReference, No. 7, ER07-12RX03.
http://www.ansespro.fr/euroreference/numero7/PN9001.htm



Le projet EQADeBa (Establishment of Quality Assurances for Detection of Highly Pathogenic Bacteria of Potential Bioterrorism Risk), financé par l'Union européenne (UE), comprenait 23 partenaires de 21 pays européens et était coordonné par l'Institut Robert Koch. L'objectif était d'effectuer et d'analyser des exercices pratiques d'assurance qualité externe ou EQAE (External Quality Assurance Exercises) axés sur des bactéries pouvant être considérées comme des agents potentiels de bioterrorisme entraînant des maladies telles que le charbon, la tularémie, la peste, la morve, la mélioïdose, la brucellose, et la fièvre Q. En outre, des réunions et des formations ont contribué à la mise en place d'un solide réseau de laboratoires et de diagnostic constitué des participants et d'autres laboratoires supplémentaires.
Trois séries d'EQAE, comprenant l'examen d'échantillons plus ou moins complexes, ont eu lieu afin d'évaluer les capacités réelles des laboratoires concernés, y compris tous les aspects de la sécurité et de la sûreté biologiques.
L'évaluation des résultats des exercices et les formations pratiques ont permis d'assurer le haut niveau de qualité des capacités de diagnostic et/ou d'améliorer les approches et méthodes appliquées par les laboratoires européens participants.


Pour pouvoir faire face à d'éventuelles attaques bioterroristes, il est essentiel que les laboratoires soient prêts à identifier correctement et rapidement des agents biologiques (Wagar 2010; Grunow 2002). À cet effet, le projet EQADeBa ("
Establishment of Quality Assurances for Detection of Highly Pathogenic Bacteria of Potential Bioterrorism Risk", financé par l'UE (EAHC n° 2007 204), et coordonné par l'Institut Robert Koch (RKI), en Allemagne, a été mené en collaboration avec initialement 23 partenaires de 21 pays européens (tableau 1). Le projet a démarré en mai 2008 et s'est déroulé sur une période de 36 mois. Il a été lancé suite aux résultats d'un appel d'offres de la Direction Générale de la santé et des consommateurs (DG SANCO) concernant un exercice d'assurance qualité externe (EQAE) en 2006, indiquant la nécessité de continuer à améliorer la fiabilité du diagnostic pour les bactéries présentant un risque potentiel en matière de bioterrorisme.

L'objectif du projet EQADeBa était de fournir une infrastructure appropriée et de concevoir, organiser et gérer des exercices pratiques d'assurance qualité externe pour les bactéries pouvant être considérées comme des agents potentiels de bioterrorisme entraînant des maladies telles que le charbon, la tularémie, la peste, la morve, la mélioïdose, la brucellose et la fièvre Q (Pappas 2009). Le projet a directement renforcé la capacité d'alerte précoce et de réponse rapide en vue de réagir efficacement aux attaques bioterroristes ainsi qu'aux épidémies naturelles. Dans ce contexte, des laboratoires européens spécialisés dans les agents pathogènes à très haut risque, désireux d'apporter leur soutien, ont mis en place le réseau ENHPB (
European Network for Highly Pathogenic Bacteria - ENHPB) capable d'identifier et de caractériser des agents biologiques susceptibles d'être utilisés à des fins de bioterrorisme.

Une collection d'échantillons de référence, comprenant toutes les bactéries cibles, a été créée dans le cadre du projet EQADeBa en vue d'effectuer des exercices d'assurance qualité externe et de permettre aux laboratoires d'auto-évaluer des méthodes et instruments développés récemment. Les bactéries de cette collection, fournies en partie par les partenaires, ont été caractérisées en utilisant toutes les méthodes microbiologiques et moléculaires disponibles. Toutes les souches figurant dans cette collection et dont la qualité a été contrôlée, stockées à -80°C, ainsi que l'ADN quantifié et le matériel inactivé obtenu à partir de ces souches, stockés à -20°C, font partie du matériel de référence. À la fin du projet, la collection contenait 161 souches. Afin de garantir la disponibilité à long terme de cette source de matériel de référence de micro-organismes hautement pathogènes, il est indispensable d'assurer l'entretien continu et la prolongation de cette collection.

Trois séries d'EQAE, utilisant des échantillons de complexité croissante et incluant tous les aspects de la sécurité et de la sûreté biologiques, ont eu lieu afin d'évaluer et d'améliorer les capacités actuelles des laboratoires impliqués. L'institution responsable de la coordonnination de ce projet (l'institut Robert Koch / RKI) a organisé les EQAE, y compris la préparation, la caractérisation, l'assurance qualité, la livraison des échantillons et l'analyse des résultats. La planification des exercices, la discussion des résultats et l'élaboration des recommandations ont été abordées avec tous les participants lors des réunions générales. L'objectif primordial était de développer une « norme de référence » pour la détection et l'identification de bactéries à très haut risque. Concernant le transport et la manipulation d'agents pathogènes, un questionnaire sur la sécurité et la sûreté biologiques a été élaboré et utilisé pour l'échange de bactéries pathogènes entre les partenaires du projet (Zaki 2010).

Si le premier exercice a porté uniquement sur l'ADN et les bactéries inactivées, les deux suivants ont impliqué à la fois des bactéries vivantes et inactivées. Les bactéries à très haut risque suivantes ont été considérées pour les tests de détection :
Bacillus anthracis, Francisella tularensis ssp, tularensis et ssp. holarctica, Yersinia pestis, classifiés comme agents de catégorie A, selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis (CDC). Parmi les souches de catégorie B, les agents pathogènes suivants ont été concernés : Burkholderia mallei, Burkholderia pseudomallei, Brucella melitensis, Brucella abortus et Coxiella burnetii (ADN seulement). Pour garantir la qualité des échantillons, le coordonnateur (RKI) a vérifié la stérilité ou la viabilité des bactéries, la pureté du matériel et des souches, la contamination croisée avec d'autres échantillons par une PCR appropriée en temps réel et d'autres PCR en vue d'une caractérisation supplémentaire des souches. Les exercices ont été conçus avec un niveau de difficulté croissant. Le but était d'évaluer, de conserver et/ou d'améliorer les compétences et capacités des instituts partenaires en matière de détection de bactéries hautement pathogènes. Les exercices ont été décidés conjointement avec tous les participants, et le panel d'échantillons fournis a été composé de manière adéquate pour pouvoir satisfaire les objectifs des exercices.

Tous les échantillons sont arrivés dans les laboratoires partenaires sans complications. La vitesse du diagnostic a pu être considérablement améliorée au cours des trois exercices. Une tâche supplémentaire a consisté à tester la sensibilité des bactéries isolées à différents groupes d'antibiotiques. Une autre tâche supplémentaire a été l'estimation de la charge bactérienne des échantillons inactivés contenant diverses matrices. Il a été demandé aux participants de décrire les méthodes utilisées et de fournir les résultats dans un protocole final.

Les échantillons les plus exigeants étaient les bactéries vivantes (second et troisième EQAE) contenant des cultures mélangées. Tous les laboratoires ont fait preuve d'un niveau de qualité élevé dans l'exécution des exercices, avec plus de 90 % de résultats corrects en moyenne. Tout au long du projet, une nette amélioration des résultats positifs corrects et des résultats négatifs corrects a été observée, avec par exemple une augmentation respective de 90% à 96% et de 90% à 97%, pour les échantillons natifs. Toutefois, il faudrait envisager d'améliorer encore ces résultats. Des problèmes ont été rencontrés en raison de la contamination croisée lors de la manipulation d'agents hautement concentrés et également à cause de la spécificité et sensibilité inadéquates de certaines des méthodes utilisées. Les performances des laboratoires ont pu être améliorées grâce à la résolution des problèmes mentionnés ci-dessus. Des mesures de résolution des problèmes en personne, spécifiquement adaptées aux résultats des instituts partenaires ont joué un rôle particulièrement important. D'autres facteurs notables ont été l'échange des meilleures pratiques et approches entre les instituts partenaires ainsi que la formation proposée et organisée au sein du réseau, en tant que de besoin.

Presque tous les partenaires ont pris part à la formation dispensée par les autres partenaires. La formation visait à améliorer les capacités de diagnostic, à mieux connaître les instituts partenaires et leur façon de travailler, et à soutenir un réseau de laboratoires fiables parmi les États membres de l'UE. Une troisième série d'EQAE a permis de valider l'efficacité de la formation du personnel des partenaires du réseau et les améliorations correspondantes.

Ainsi, le projet a largement optimisé le niveau de préparation des laboratoires désignés dans un grand nombre d'États membres de l'UE à faire face à l'éventualité d'un évènement ou d'une menace de bioterrorisme. Le réseau de laboratoires européens ainsi établi a permis de renforcer considérablement les capacités, la masse critique et les compétences nécessaires pour la détection d'agents pathogènes bactériens à très haut risque.

De fait, toutes les activités décrites ci-dessus sont importantes non seulement dans la perspective de l'introduction intentionnelle dans l'environnement des micro-organismes hautement pathogènes en question, mais également dans la perspective d'une épidémie naturelle dans l'environnement (Jenzora 2008; Radun 2009; Reintjes 2002; Tärnvik 2004). Celle-ci exigerait à son tour la mise en œuvre de méthodes diagnostiques au niveau des laboratoires [23]. Le champ d'action européen est le cadre le plus approprié pour évaluer, améliorer et soutenir ces diagnostics, et pour disposer d'une large plate-forme de développement et d'échange de connaissances, de méthodes et de matériels de référence sur ces maladies souvent « négligées » mais potentiellement très dangereuses. Par conséquent, parmi les recommandations finales, il conviendra d'inclure un soutien continu, via la Commission européenne, à ce réseau de laboratoires dédié au diagnostic des bactéries hautement pathogènes, pour qu'il inscrive son action dans le long terme.

En fait, une action commune avec 33 laboratoires participants de 23 pays, soutenue par la DG Sanco de la Commission européenne, a été lancée en août 2011. Elle vise à rapprocher et consolider les objectifs des deux réseaux actifs dans le domaine des bactéries hautement infectieuses d'une part et des virus hautement infectieux d'autre part : le projet ENHPB/EQADeBa, coordonné par l'Institut Robert Koch (RKI), en Allemagne (EAHC n° 2007 204) et le projet ENP4-Lab, coordonné par l'Institut National des Maladies Infectieuses « Lazzaro Spallanzani », en Italie (EAHC n° 2006 208) (Nissii 2009). Les principaux objectifs sont d'organiser un échange universel des meilleures stratégies de diagnostic, permettant de soutenir une réponse européenne en cas d'épidémies causées par des agents infectieux hautement pathogènes, et de développer la biodiversité des échantillons conservés dans la collection de matériel de référence. Le projet fournira une infrastructure et une stratégie européennes capables de soutenir les exercices d'assurance qualité externe (EQAE) et développera les procédures opératoires normalisées (SOP) pour faciliter la réponse des laboratoires aux évènements transnationaux impliquant des agents pathogènes à très haut risque dans l'UE.


Clause de non-responsabilité
Cette publication a été réalisée avec l'aide de l'Agence exécutive pour la santé et les consommateurs (EAHC) de la Commission européenne. Son contenu relève de la seule responsabilité du Centre de sécurité biologique de l'Institut Robert Koch, et ne peut être en aucun cas interprété comme reflétant le point de vue de l'EAHC ou de tout autre organe de l'Union européenne.


Références
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Jenzora, A., Jansen, A., Ranisch, H., Lierz, M., Wichmann, O. and Grunow, R. 2008. Seroprevalencestudy of Francisellatularensisamong hunters in Germany. FEMS Immunol Med Microbiol., 53(2): 183-9.
Nisii, C., Castilletti, C., Di Caro, A., Capobianchi, M.R., Brown, D., Lloyd, G. et al. 2009. Euronet-P4 Group. The European network of Biosafety-Level-4 laboratories: enhancingEuropeanpreparedness for new healththreats. Clin Microbiol Infect., 15(8): 720-6.
Pappas, G., Panagopoulou, P. and Akritidis, N. 2009. Reclassifyingbioterrorismrisk: are wepreparing for the properpathogens? J Infect Public Health, 2(2): 55-61.
Radun, D., Bernard, H., Altmann, M., Schöneberg, I., Bochat, V., van Treeck, U. et al. 2010. Preliminary case report of fatal anthrax in an injectingdrug user in North-Rhine-Westphalia, Germany, December 2009. Euro Surveill., 15(2).
Reintjes, R., Dedushaj, I., Gjini, A., Jorgensen, T.R., Cotter, B., Lieftucht, A. et al. 2002. Tularemiaoutbreak investigation in Kosovo: case control and environmentalstudies. Emerg Infect Dis., 8(1): 69-73.
Tärnvik, A., Priebe, H.S. and Grunow, R. 2004. Tularaemia in Europe: an epidemiologicaloverview. Scand J Infect Dis., 36(5): 350-5.
Wagar, E.A., Mitchell, M.J., Carroll, K.C., Beavis, K.G., Petti, C.A., Schlaberg, R. and Yasin, B. 2010. A review of sentinellaboratory performance: identification and notification of bioterrorism agents. ArchPatholLab Med., 134(10): 1490-503.
Zaki, A.N. 2010. Biosafety and biosecuritymeasures: management of biosafetylevel 3 facilities. Int J Antimicrob Agents, 36 Suppl 1: S70-4.


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Bacillus anthracis, culture de 24 heures sur gélose Columbia au sang
Tableau 1 - Établissements participant au projet EQADeBa financé par l'UE

o Robert Koch-Institut (RKI), Allemagne
o Agence pour la santé et la sécurité alimentaire (AGES), Autriche
o Centrum VoorOnderzoek in Diergeneeskunde en Agrochemie (CODA-CERVA), Belgique
o Friedrich-Loeffler-Institut (FLI-IBIZ), Allemagne
o IstitutoSuperiore di Sanité (ISS), Italie
o Institut suédois de contrôle des maladies infectieuses (SMI), Suède
o Health Protection Agency (HPA), Royaume-Uni
o Institut national de la santé et du bien-être (THL), Finlande
o Université nationaleetcapodistrienned'Athènes (NKUA), Grèce
o Centre national d'épidémiologie (NCEBACT), Hongrie
o National Public Health Surveillance Laboratory (NPHSL), Lituanie
o Norwegian Institute of Public Health (NIPH), Norvège
o Institut national d'hygiène (PZH), Pologne
o Basque Foundation for Health Innovation and Research (BIOEF), Espagne
o Institut national pour la santé publique et l'environnement (RIVM), Pays-Bas
o IstitutoZooprofilatticoSperimentaledellaPuglia e dellaBasilicata (IZSPB), Italie
o National Center of Infectious and ParasiticDiseases (NCIPD), Bulgarie
o Institut fürMikrobiologie der Bundeswehr (IMBBw), Allemagne
o Laboratoire National de Santé (LNS), Luxembourg
o Institut de Recherche Biomédicale des Armées (CRSSA), France
o Institut national de protection nucléaire, biologique et chimique (SUJCHBO), République tchèque
o InstitutoNacional de Saúde Dr. Ricardo Jorge (INSA), Portugal
o Office fédéral de la protection de la population (OFPP), Laboratoire Spiez, Suisse

Francisella tularensis ssp. holarctica, culture de 78 heures sur gélose cystéine-cœur au sang
Conteneurs hautement isolés pour le transport d'agents pathogènes de catégorie A