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Le Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox : un réseau de réseaux intégrés pour répondre aux besoins d'analyses face à une menace terroriste


P. Binder
Médecin général inspecteur (2s), Président du conseil scientifique du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox, conseiller sécurité-défense du directeur général de l'Inserm, Inserm, Paris, France

P. Binder (2012). Le réseau National des laboratoires Biotox - Piratox : un réseau de réseaux intégrés pour répondre aux besoins d'analyses face à une menace terroriste, EuroReference, No. 7, ER07-12RX01.
http://www.ansespro.fr/euroreference/numero7/PNT301.htm



Origine du réseau des laboratoires
Au début des années 2000 la vulnérabilité face aux risques d'attentat mettant en jeu des agents biologiques ou chimique fait partie de préoccupations des responsables de la sécurité publique. Les nombreuses alertes auxquelles un certain nombre de laboratoires ont du faire face d'octobre à décembre 2001 et le retour d'expérience de cette crise des "enveloppes" connue outre atlantique sous le nom d' "Amerithrax" ont conduit le Secrétariat général à la défense et la sécurité nationale (SGDSN) (1) à mettre en place un réseau de laboratoires pouvant être sollicité pour l'analyse "de plis et colis suspects de contenir des agents biologiques, chimiques ou radioactifs dangereux". Ce premier réseau, d'abord destiné à la recherche de Bacillus anthracis, a très rapidement été considéré comme trop restreint, à la fois dans son périmètre de compétence et dans sa répartition territoriale. C'est pourquoi, en 2004, le SGDSN a proposé de l'élargir et de le structurer en lui confiant des missions de prise en charge d'analyses couvrant l'ensemble du spectre des agents chimiques et biologiques considérés comme pouvant présenter une menace terroriste. Un mandat interministériel a donc été confié à un groupe d'experts qui a organisé le "Réseau national des laboratoires Biotox -Piratox" autour de 4 réseaux :
- Le réseau du dispositif
, colis et substances suspectés de contenir des agents…dangereux ,
- Le réseau des laboratoires d'analyse
d'eau potable dont certains sont à même d'assurer une permanence 24h/24,
- Le réseau des
laboratoires spécialisés répartis entre ceux qui peuvent faire face à la plupart des situations d'urgence, y compris en cas d'implication d'un agent chimique de guerre et ceux qui ne peuvent prendre en charge que des prélèvements d'origine environnementale. La plupart des laboratoires de biologie clinique des centres hospitalo-universitaires (CHU) des grands centres urbains et ceux des hôpitaux d'instruction des armées (HIA) y participent.
- Enfin, le réseau des
centres nationaux de référence (CNR) pour les principaux agents de la menace. Ce réseau n'entre pas dans le dispositif de réponse précoce à une alerte, mais il est mobilisable pour la confirmation et l'authentification d'un agent suspect.

Le comité de pilotage
Un comité de pilotage coprésidé par le SGDSN et la Direction générale de la santé assure l'organisation générale du réseau et de ses structures. Organe de décision, ce comité est composé des membres institutionnels issus des différents ministères impliqués dans la thématique NRBC, des agences et instituts y prenant part et du Président du conseil scientifique. Ce comité de pilotage fixe les orientations de travail du réseau, alloue les budgets correspondants et valide la politique scientifique.

Structuration et cartographie du réseau national des laboratoires
L'organisation du fonctionnement réseau est très proche de celle mise en place dans des pays comparables. La spécificité de l'approche française est d'associer, dans une même organisation, des compétences biomédicales, environnementales, vétérinaires, en chimie analytique et en toxicologie. Il s'agit d'un "réseau de réseaux" qui répond à la pluridisciplinarité et aux fonctionnalités complémentaires de ses membres. Ce "réseau de réseaux" repose sur trois niveaux de responsabilités, et s'appuie sur l'organisation territoriale de la défense civile : chacune des sept "zones de défense" dispose donc de laboratoires identifiés qu'il peut solliciter en cas de besoin. Restent au niveau national des laboratoires de référence et des laboratoires à compétence particulière. Les départements et territoires d'Outre-Mer s'inscrivent aussi dans ce dispositif. La cellule Nationale de Conseil, CNC, rattachée à la direction de la sécurité civile du ministère de l'intérieur, participe, au fonctionnement du réseau (voir encadré).

Les 3 niveaux d'organisation du réseau national des laboratoires
Niveau 1
: Laboratoires sentinelles. Idéalement le rôle de “sentinelle” devrait être rempli par tous les professionnels ayant vocation à recevoir des matières ou échantillons à analyser. Il n'est donc pas prévu à ce jour de catalogue pour les laboratoires de ce niveau dont la mission, dans le cadre Biotox-Piratox, sera d'abord de signaler aux autorités toute demande d'analyse suspecte et d'adresser les produits ou échantillons à analyser à un laboratoire de niveau 2 en mesure de les prendre en charge. L'objectif, à terme, sera donc en priorité de mettre en place pour ce niveau un programme d'information adapté au “dépistage” et à la "levée de doute", et un plan de diffusion de celle-ci. Ce travail, important, n'a pas encore été entrepris.
Niveau 2 : Laboratoires référents de zones et laboratoires experts associés. Ces laboratoires constituent le cœur opérationnel du dispositif. Chaque zone de défense dispose d'au moins un laboratoire référent "santé humaine" et d'un laboratoire référent "environnement et chimie-toxicologie". Des laboratoires experts associés complètent le dispositif. Les 10 laboratoires du "réseau eau" et 10 laboratoires du "réseau des HIAs et instituts militaires" y figurent. Au total environ 100 laboratoires ont été identifiés et peuvent potentiellement participer au réseau des laboratoires Biotox-Piratox à ce niveau. Ces laboratoires ont été sélectionnés à partir des résultats d'une enquête effectuée en 2005 par le Conseil scientifique. Outre le secteur d'activité, ont été pris en considération des critères de localisation géographique, de capacité technique, d'équipements et de possibilité d'assurer une permanence H24. Pour les laboratoires "santé humaine", les référents appartiennent à un CHU de la Zone de défense. Pour les laboratoires "environnement - toxicologie", les laboratoires du réseau "biotox eau" et certains laboratoires de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et le Laboratoire central de la préfecture de police (LCCP) ont été retenus. Les Centres anti-poisons, le réseau des laboratoires de la police nationale ainsi que l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) sont également recensés en tant que laboratoires associés. Le catalogue de ces laboratoires est à la disposition de la Cellule Nationale de Conseil (CNC).
Niveau 3 : Les centres nationaux de référence et laboratoires à compétence nationale. Ces laboratoires sont destinés à être sollicités pour effectuer des contrôles et des confirmations d'identification. En microbiologie, ils appartiennent au réseau des CNRs. Le centre Maitrise NRBC de la Direction générale pour l'armement (DGA) pour les agents chimiques de guerre, l'Institut de recherche biomédical des armées (IRBA) et le Laboratoire P4 "Jean Mérieux" de Lyon ont également une compétence nationale. Pour les toxiques industriels enfin, le LCPP et l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) ont aussi une vocation de d'expertise nationale.
Les laboratoires de niveau 2 et 3 doivent disposer d'un certain nombre d'équipements en conformité avec la réglementation, notamment pour ceux qui ont à manipuler des agents pathogènes. Les agents de la menace bioterroriste étant tous des agents de Classe 3 ou plus, chacun de ces laboratoires doit donc être équipé d'une enceinte ou d'un espace capable d'assurer une sécurité biologique de niveau 3 et de répondre aux exigences de sûreté biologique. Ainsi tous les laboratoires de CHU disposent de LSB3 (laboratoires de sécurité biologique de classe 3). Le service de santé des armées a également acquis, pour ses hôpitaux d'instruction ne possédant pas de LSB3, des modules "shelters LSB3" et il dispose, pour des besoins de "force de projection", de 2 "modules spécialisés", capables de traiter des échantillons suspects nécessitant un niveau 2 de sécurité biologique. Tous ces laboratoires sont dotés des équipements de biologie moléculaire pour le diagnostic et la détection rapide semi-quantitative par amplification de séquence génique et hybridation. Des moyens de prévention et de contrôle NRBC spécifiques et des équipements de protection adaptés doivent être disponibles pour ces laboratoires et leur personnel qui doivent en connaître la destination et le mode d'emploi. En revanche, la responsabilité de la "levée de doute" ne leur incombe pas. Elle est effectuée en amont par les services
ad hoc requis par les services préfectoraux, de police ou de secours. La disponibilité de portiques ou de moyens de contrôle d'un risque explosif n'est pas indispensable.

Ce réseau de réseau dispose depuis 2004 d'un conseil scientifique sur lequel s'appuient largement la DGS et le comité de pilotage pour son animation.

Le conseil scientifique du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox
Le mandat initial du conseil scientifique portait sur 4 points essentiels :
- identifier et suivre la "cartographie des capacités et des compétences" des membres du réseau
- proposer des guides de bonne pratique pour les
procédures de prélèvement, d'acheminement, et de traitements des échantillons à analyser,
- organiser et animer des exercices inter-laboratoires destinés notamment à s'assurer des capacités et limites de l'organisation, de sa fonctionnalité et, sur le plan technique, de la fiabilité des résultats quelles que soient les méthodes d'analyse mises en œuvre.
- participer à la formation et l'information des responsables des différents laboratoires, des intervenants, à l'aide d'outils pédagogiques et lors de séminaire et réunions de travail.

Dans ses missions, le conseil scientifique doit veiller à la formation technique et générale des personnels des laboratoires participant au réseau, en particulier des personnels des niveaux 2 et 3. A cet effet le conseil organise annuellement des séminaires.

Les séminaires
Ces séminaires sont l'occasion pour les membres du réseau de faire le point sur des questions très diverses d'ordre technique et administrative. Organisés depuis 2006 ils sont un rendez-vous attendu. Le nombre de participants, limités aux seuls membres du réseau et à quelques invités d'instances ministérielles et des zones de défense directement concernés, initialement de l'ordre de 100 personnes avoisinait les 200 en 2011. Bien entendu les acteurs de terrain des services de secours, de la police et de la gendarmerie sont également invités car ils représentent le premier maillon indispensable du processus.
Ces séminaires sont ouverts à la participation de correspondants étrangers, en particulier européens.
L'Ecole du Val de Grâce, depuis le deuxième séminaire, accueille ce rendez-vous annuel.

Organisés autour d'un thème pratique choisi par le conseil scientifique, chaque séminaire laisse de nombreux espaces de temps aux rencontres entre les participants facilitant ainsi les échanges interdisciplinaires. A côté des conférences techniques et scientifiques, les ateliers thématiques sont l'un des temps fort de ces séminaires. Ce sont des forums au cours desquels s'échangent librement des idées et des avis constructifs et appréciés. Habituellement dédiés au RETEX des exercices, ils ont, par exemple en 2011, été consacrés plus particulièrement à la présentation des guides de bonnes pratiques "prélèvement" et "identification" et à la nouvelle réglementation MOT. Des améliorations des guides ont été proposées et sont prises en compte. Il apparaît que la demande de standardisation porte d'abord sur les
prélèvements et leur acheminement. Les fiches annexées à la circulaire 750 sont à cet égard indispensables. Il reste néanmoins encore des points à clarifier. Par exemple, pour la partie identification il est souvent réclamé des fiches (par agent, matrice…), décrivant des moyens et procédés auxquels les laboratoires pourraient se référer afin de mieux cerner leurs compétences réelle dans le cadre des missions du réseau.
Les inquiétudes et les contraintes suscitées par l'application des arrêtés de juillet 2004 et le décret du 30 juin 2010 sur la détention et la mise en œuvre de microorganismes et toxines (MOT) a nécessité plusieurs mises au point et suscité bien des débats lors des ateliers de ces séminaires. La circulaire 750 "relative à la découverte de plis, colis, contenants et substances suspectés de renfermer des agents radiologiques, biologiques ou chimiques dangereux" a également été largement commentée.
La fréquentation de ces séminaires, aussi bien par des responsables de laboratoires, que par des primo intervenants de terrain ou des institutionnels est croissante. En 2011 il y avait 212 inscrits et 183 présents. Ces séminaires sont bien un des volets concrets de la mission de formation au profit des laboratoires du réseau.

La formation, un objectif central des missions du conseil scientifique du réseau national Biotox-Piratox
La conception et la mise en place de formations est inscrite au programme de travail du conseil scientifique du réseau national des laboratoires Biotox-Piratox. Ces formations ont pour objectif de permettre aux personnes pouvant être impliquées dans une expertise, demandée au titre d'un processus Biotox-Piratox, d'acquérir les compétences nécessaires au traitement des échantillons ou prélèvements reçus en respectant les règles de bonne pratique adaptées.
La compétence technique, qu'elle s'exerce dans le domaine chimique ou biologique, est assurée et maintenue par le savoir-faire analytique de routine des laboratoires du réseau. Des formations spécifiques destinées à valider les techniques mises en œuvres spécifiquement par chaque laboratoire dans le cadre Biotox-Piratox, en fonction de ses choix ou de ses compétences sont proposées, notamment pour le domaine biologique.
C'est par exemple l'objectif du projet VARTOX, conçu il y a déjà quelques années, par un consortium de biologistes civils et militaires animé par le Pr Vincent Jarlier. Cette formation, destinée à tous les laboratoires de premier niveau, est basée sur une mallette pédagogique et permet de se familiariser à la détection de toxines ou de pathogènes rarement rencontrés en pratique courante, et figurant sur la liste des Microorganismes et toxines (MOT) soumis à déclaration de détention et d'usage.
D'autres formations techniques existent, le plus souvent dans un cadre universitaire. Ce sont des formations destinées aux techniciens comme celles proposées par la Faculté de médecine de Marseille, ou des masters professionnels dédiés aux méthodes biologiques et d'évaluation des risques pour l'homme.

Le réseau national des laboratoires Biotox-Piratox est naturellement concerné par l'acquisition de compétences dans les domaines de la sécurité et la sûreté chimique et/ou biologique. Le conseil scientifique s'intéresse dans ce cadre à toutes les initiatives destinées à améliorer les formations techniques. Elles doivent compléter les enseignements issus des exercices qui sont organisés annuellement par le conseil scientifique. A chaque exercice participent régulièrement entre 25 et 30 laboratoires. Lors des différents retours d'expérience de ces exercices le besoin de formations ciblées a été largement exprimé. Ils portent moins sur les aspects techniques que sur les aspects procéduraux amont (collecte et acheminement des prélèvements) et aval (présentation et adressage des résultats, communication, conservation des prélèvements analysés).

En somme, sensibiliser et former les acteurs de terrain d'une part sur les implications de la circulaire 750 et sa mise en œuvre, et d'autre part, sur les aspects légaux et règlementaire, par exemple lors d'une intervention technique dans le cadre d'une procédure judiciaire est une action prioritaire. L'importance des questions pédagogiques et de formation est évidente et une harmonisation nationale avec les pratiques internationales une nécessité. Les actions dans ce domaine constituent une priorité pour le conseil scientifique.

Exercices du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox
Les exercices organisés par le Conseil scientifique représentent une autre des missions majeures de l'animation du réseau. Depuis la mise en place du conseil scientifique, 4 exercices dans le domaine biologique et 1 exercice chimique ont été organisés. Plus de 20 laboratoires y participent régulièrement.
Les membres du conseil scientifique du réseau des laboratoires Biotox-Piratox assurent la mise en place et le suivi technique de ces exercices qui sont financés sur le budget annuel accordé par le SGDSN et géré par le DUS. Pour chaque exercice un pilote est chargé de définir le ou les scénarios, un laboratoire du réseau volontaire assure la préparation des échantillons qui sont acheminés vers les laboratoires le plus souvent par transporteur agréé, après obtention des autorisations règlementaires.

En somme le réseau national des laboratoires Biotox-Piratox est une expérience unique d'intégration de laboratoires hétérogènes dans leurs cultures, leur mission et leur origine, pour donner une cohérence de fait à la conduite d'une action ayant un objectif commun : assurer la permanence du soutien de l'expertise analytique dans un contexte de crise terroriste impliquant des agents infectieux ou toxiques chimiques. Le pilotage par un comité interministériel, la délégation de la conduite du réseau à un opérateur unique, le DUS de la direction générale de la santé, le rôle essentiel et central de la cellule nationale de conseil (CNC) dans le suivi des saisines et le répertoire des laboratoires du réseau, et bien entendu le maintien d'une animation soutenue par le Conseil scientifique rendent compte de la réalité de cet outil au service de la collectivité nationale. Parmi les objectifs fixés au conseil scientifique pour les années à venir il peut être retenu :
- actualiser et consolider le répertoire des laboratoires du réseau tenu par la cellule national de conseil (CNC), en tenant compte de l'évolution de leurs capacités et de leurs compétences ;
- répertorier et organiser le réseau des "laboratoires sentinelles", élaborer et mettre en place à leur intention les outils d'information nécessaires à leur efficacité ;
- poursuivre l'organisation d'exercices et de séminaires ;
- mettre à disposition du plus grand nombre les "guidelines" et les fiches techniques qui s'y rapportent ;
- consolider l'offre de formations au profit des membres du réseau à travers un schéma directeur pédagogique et un plan de formation expérimental aux techniques spécifiques du Plan gouvernemental NRBC (2010) ;
- poursuivre le travail d'information sur les technologies nouvelles pouvant intéresser ou impacter l'activité du réseau ; il s'agit d'une mission de fond du Conseil scientifique dont il est prioritairement tenu compte dans l'organisation des séminaires. Cette information scientifique et technique, qui peut aller au delà des questions de techniques et technologies dévolues à l'analyse chimique ou biologique, doit néanmoins rester au cœur des préoccupations et la réalité des acteurs de terrain. A cet effet la session du séminaire consacrée aux développements industriels revêt un intérêt particulier.



(1) À l'époque Secrétariat général à la défense nationale (SGDN)
Réseaux
Le réseau National des laboratoires Biotox - Piratox : un réseau de réseaux intégrés pour répondre aux besoins d'analyses face à une menace terroriste
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Schéma d'organisation du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox
Les thèmes technico-scientifiques des derniers séminaires
Les 5ième et 6ième séminaires du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox se sont déroulés fin avril 2010 et 2011 à l'Ecole du Val de Grâce.
En 2010 le thème d'information générale technico-scientifique en rapport avec les missions du réseau était consacré aux technologies émergentes, en particulier la « biologie synthétique ». En 2011 le conseil a fait appel, encore plus largement que l'année précédente, à des orateurs étrangers sur les questions d'organisation et de procédure de fonctionnement des équivalents de notre réseau : 1 orateur américain et 3 européens sont ainsi intervenus.
Les questions scientifiques portaient sur les approches techniques d'analyse chimiques et leur prolongement possible pour les analyses biologiques.
En 2010, une demi-journée a été dédiée au rôle des centres nationaux de référence (CNR) dans le fonctionnement du réseau. L'Institut national de veille sanitaire (InVS) a été invité à faire part de ses attentes en matière de contribution pour le cahier des charges de ces CNRs dont il a la tutelle. Les échanges ont permis de préciser les capacités et limites de ces CNRs ainsi que l'opportunité qu'ils représentent pour le réseau. Le conseil scientifique a élaboré à l'issue de ce séminaire une proposition d'expression de besoin qui a été adressée à l'InVS et prise en compte dans son appel d'offre de 2011 pour les CNRs.
En 2012 le septième séminaire du Réseau national des laboratoires Biotox-Piratox sera plus spécialement consacré aux cursus pédagogiques destinés aux personnels, notamment sur les questions de sécurité et de sûreté.
La cellule nationale de conseil
Philippe Vuylsteke, capitaine, responsable de la Cellule Nationale de Conseil
En 2001, l'envoi de “lettres à l'anthrax” aux États-Unis entraîne la contamination de vingt deux personnes et le décès de cinq d'entre elles. A la suite de ces événements, une importante vague de lettres suspectes a déferlé sur l'Europe et notamment en France. L'absence de procédure de levée de doute a conduit les laboratoires experts impliqués à procéder à des analyses systématiques de tous les « colis suspects ».
Le retour d'expérience de cet épisode a mis en évidence la nécessité de mener, en amont de l'envoi à des laboratoires pour investigation, une évaluation du danger basée sur un processus analytique de levée de doute. C'est pour cette mission que le gouvernement a décidé, en 2003, la mise en place d'une Cellule Nationale de Conseil (CNC) dont les missions sont fixées dans la circulaire interministérielle n° 750 élaborée sous l'égide du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.
Placée au sein du ministère de l'intérieur, sous l'autorité du directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, la CNC a vocation à conseiller les autorités administratives et judiciaires, confrontées à la découverte de plis, colis, contenants et substances suspectés de renfermer des agents radiologiques, biologiques ou chimiques dangereux. Ce dispositif s'appuie dans un premier temps sur la pertinence des premiers éléments recueillis et des premières mesures prises par les services de police et les forces de gendarmerie, assistés par la CNC dans leur démarche de levée de doute puis, seulement en cas de doute ou de menace réelle, sur les services spécialisés RBC-E (radiologique, biologique chimique & explosifs) et les Laboratoires du Réseau National Biotox-Piratox (RNLBP).
Depuis 2011, une nouvelle circulaire étend ses missions à la découverte de toutes substances de même nature présentes dans l'environnement, l'eau de consommation, les matrices alimentaires ou tout autre vecteur consécutivement à un acte délibéré, malveillant ou dû à une négligence. Elle intervient dans la gestion opérationnelle et l'activation du RNLBP. En effet, elle recherche, sur demande, le ou les laboratoires à même de répondre au mieux à chaque situation particulière, et peut demander l'activation du RNLBP, en tant que de besoin, notamment lorsque la crise revêt une importance nationale. La CNC suit l'évolution de la capacité opérationnelle du RNLBP et tient les archives des résultats d'analyse des laboratoires à l'aide d'une base de données qui recense, aujourd'hui, plus de 1300 signalements. En 2003, la CNC enregistrait 207 signalements, depuis 2010, ce nombre se stabilise autour de 150 chaque année. La proportion de signalements ayant fait l'objet d'analyses sur la recherche des agents de la menace est passée de 77,8 % à moins de 2% en 2011.
En somme, neuf ans après sa création, la CNC a démontré son intérêt et son efficacité et répond bien à l'objectif qui lui a été assigné en priorité : apporter une réponse opérationnelle proportionnée à l'événement et fournir des conseils opérationnels à l'ensemble des acteurs de terrain et des décideurs publics.
Formations à la sécurité et la sureté dans les domaines chimiques et biologiques
L'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) organise des formations dans le domaine du risque radiologique et nucléaire, et plusieurs universités affichent un programme pédagogique en toxicologie analytique et environnementale. L'INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques) participe à certaines d'entre elles. Les questions de sécurité et de sûreté liées à la manipulation des ces agents pathogènes, toxines et toxiques impose également des formations techniques dédiées. L'INRS (Institut national de recherche en sécurité)S de Nancy participe à l'élaboration des normes et à la formation à la sécurité au travail, notamment pour tout ce qui touche à la manipulation des toxiques chimiques.
A l'issue du colloque organisé par la société de microbiologie française (SFM) en septembre 2011, le besoin d'une harmonisation et de bases communes pour les cycles de formation à la sécurité et la sûreté biologique a été mis en évidence. Ces questions sont bien entendu au programme de masters dont celui de Sciences et Technologies Mention Santé publique et Sciences sociales Spécialité : Risques sanitaires Radionucléaires, Biologiques et Chimiques, piloté par l'Ecole du Val de Grâce. L'Université de Lille organise, en 2012, le premier diplôme universitaire spécifiquement dédié à la sécurité et à la sureté biologique, en partenariat avec le Service de santé des armées et l'AFSSAPS.
En 2008, dans le cadre d'un travail Européen, les formations en sureté et sécurité biologique avaient déjà fait l'objet d'un recensement. Plusieurs pays disposent de centres de formation à la sûreté biologique (biosecurity training courses centre), ou simplement de programmes de formation. Les plus nombreux sont organisés aux USA.
Des associations régionales se sont mises en place pour coordonner des actions scientifiques et pédagogiques en sécurité et sûreté biologique, l'OMS propose des formations destinées à des pays défavorisés. Si ces formations sont très souvent axées sur la sécurité biologique dans la manipulation des OGM (protocole de Carthagène), elles s'intéressent aussi aux risques inhérents aux détournements d'usage (sûreté). En France, la "sécurité et sûreté biologique", ne fait pas encore l'objet d'une formation professionnelle obligatoire sanctionnée par un diplôme ou une attestation de compétence technique (License), validant des formations de base destinées aux différentes catégories de personnels concernées : techniciens, ingénieurs, chercheurs, praticiens hospitaliers ou responsables de laboratoires…." `
Pourtant, aujourd'hui, des formations de ce type sont délivrées, en tant que de besoin, par compagnonnage ou par des organismes tels que l'Institut Pasteur de Lille, l'Institut Pasteur de Paris, l'Inserm, le CNRS, ou l'INRA. Le Service de santé des armées a également une formation destinée à ses personnels biologistes, chercheurs et techniciens, et occasionnellement ouverte à des opérateurs civils dans le cadre de coopérations. Enfin le laboratoire P4 Jean Mérieux a mis en place un cursus spécifique destiné aux personnes travaillant sur des pathogènes de classe 4. Il paraît souhaitable de définir officiellement une norme pédagogique à cet effet, et que les organismes délivrant ces formations soient habilités à délivrer une "License professionnelle".

7ème Séminaire du Réseau National des Laboratoires Biotox-Piratox (2011).
Crédit Photos Ecole du Val de Grace.
Zone de défense et de sécurité
Source: www.defense.gouv.fr